Mon adversaire a-t-il le droit d’exister ?

Lorsque des actes me scandalisent, il est facile de tomber dans un radicalisme qui dénigre à l’auteur de ces actes le simple droit d’exister. Cruauté, terrorisme, perversion, insensibilité de psychopathe ou de bureaucrate, idolâtrie, comment de tels individus peuvent-ils faire partie du décor ? Mon dégoût s’étend facilement à celui qui tente d’expliquer l’origine des déviances, comme si son discours en était une justification. Je refuse d’entendre quoi que ce soit sur les germes du mal. Leur simple connaissance est déjà une contamination. Entrés en moi, ne peuvent-ils créer une mansuétude puis s’insinuer odieusement dans ma propre façon de voir le monde ?

Cette crainte révèle en fait que ces concepts sont déjà en moi, soigneusement enfouis, ligotés. J’ai peur de les réveiller. Égocentrisme, colère, peur, agressivité, concupiscence, je n’ai pas besoin d’entendre parler de ces débordements pour les savoir aussi omniprésents que conquérants et stupides. Le pervers a libéré des actes que je m’efforce de retenir. Il doit payer cher son inconséquence, sinon ce sont mes propres efforts qui semblent ridicules.

Je dénigre à mon adversaire son être, non pas parce que je le découvre, mais au contraire parce que je connais son existence de longue date. Chez moi il a perdu la bataille et a fini au cachot. Mais rien ne disparaît du champ mental. L’ancien ennemi rode. Expliquer n’est pas le justifier, mais c’est déjà le revitaliser. Des sympathisants viennent lui parler à travers les barreaux.

Je préfère interdire les visites.

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